Young French director Gilles Paquet-Brenner reflects on his latest film, Sarah’s Key, in an interview by Daniele Thomas Easton on the occasion of the release of the film in the United States. Sarah’s Key was adapted from Tatiana de Rosnay’s novel, Elle s’appelait Sarah. (The English version of this interview is followed by the original French version.)
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Passionate, lively and enthusiastic, Gilles Paquet-Brenner leads us into a flood of reflections about his latest film Sarah’s Key, starring Kristin Scott Thomas, his love for the cinema, and his own new role as a father. He is hopeful that his message in this film will touch the American public in a universal way that goes beyond the historical events of the round-up of the Jews of Paris in 1942, which is shown in the film’s opening scenes.
How to classify Sarah’s Key? For the director and co-author of the screenplay, Sarah’s Key is not just another Holocaust film written by someone directly affected by the event, even if Paquet-Brenner is aware of the disappearance of part of his own family, including his grandfather, a Jewish musician of German origins, who took refuge in a free zone and was deported after being denounced by the French.
While feeling a deep and resounding respect for the victims, Paquet-Brenner bemoans the fact that the Holocaust is often “put under a glass dome.” His approach, intended as positive, is to recognize through this film, beyond the dark period of the Vichy Government, “the wounds inflicted on minorities, whichever they may be.”
He explains, “Sarah’s Key is undeniably linked to a page of our history, the history of a Jewish family in Paris in 1942. Yes, but this event has parallels in our time. In today’s world, separatism is winning ground and I hope the film can show the dangers and the absurdity of the results when they are pushed to the extreme.”
What does he think of the obligation to remember? He resists the desire to teach the viewer a lesson or impose a feeling of guilt, which he sees as the best way to achieve the opposite effect.
“It’s a film, it’s a thriller; it’s neither a historical documentary nor a teaching tool.” The fast-paced plot, the back and forth between 1942 and the present, between Paris, the French countryside and the U.S., the quest for truth, and the painful resolution of the mystery keeps viewers holding their breath and leads them to ask the question, which Julia, the journalist played by Kristin Scott Thomas, asks her colleagues: “What would you have done in their place?”
To this Paquet-Brenner adds: “In France, many viewers asked themselves what their parents’ role was during the war, what position they took, whether they had been collaborators, resistance members, passive witnesses or victims…”
“There are few remaining survivors from this period. Other than several films such as Mr. Klein, these episodes have never been mentioned except between the lines. One can talk about them more calmly today. My film brings a very modern point of view on history; it’s a reflection on the past, restoring it to better confront it, assimilating it to let us construct our future.”
Gilles Paquet-Brenner, in writing a faithful screenplay of the novel, also wanted to deal with historical facts and their repercussions on future generations. But he wants to conclude with a message of hope. Though the film contains numerous scenes about the past, perhaps due to the power of the images, major portions of the film focus on the present and the future—the future of little Sarah. In the French version, he chose for the final frame the little girl, behind the picture window of a restaurant, looking, wide-eyed, with the park spread out at her feet.
A sign of destiny? He chose to call his first child, born on the last day of the shooting for Sarah’s Key, Sunniva: ‘the gift of the sun’ in Norwegian.
Daniele Thomas Easton is the Director of France-Philadelphie, which provides consulting for French-American business and cultural projects. She is the former Honorary French Consul to Philadelphia (PA) and Wilmington (DE). She lives in Philadelphia. In 2007 she received France’s Legion of Honor.
Un entretien avec le jeune cinéaste français Gilles Paquet-Brenner: “Il faut apprendre et connaitre le passé pour pouvoir progresser.”
Passionné, vif, enthousiaste, il vous entraîne dans un flot de réflexions sur son dernier film, Sarah’s Key, qu’il est venu présenter en avant-première dans plusieurs grandes villes américaines (sortie officielle le 29 juillet) -, sur son amour du cinéma, qui lui a permis de cotoyer Marion Cotillard, Patrick Bruel, Laura Smet, avant de diriger Kristin Scott Thomas dans l’adaptation du roman de Tatiana de Rosnay, ou encore sur sa vie personnelle de tout nouveau père. Il est surtout animé par l’espoir que son message touchera le public américain de façon universelle, au-delà de l’événement historique de la rafle du Vel d’Hiv, présenté dès les premières images du film.
Comment “classifier” Sarah’s Key? Pour ce réalisateur qui a aussi participé à l’écriture du scénario, ce n’est pas un énième film consacré à la Shoah par quelqu’un de concerné directement, même si Gilles Paquet-Brenner évoque à demi-mot la disparition d’une partie de sa famille, notamment de son grand-père, musicien juif d’origine allemande, réfugié en zone libre, déporté après avoir été dénoncé par des Français. Tout en éprouvant un très profond et vibrant respect pour les victimes, il déplore que cet holocauste soit parfois “placé sous cloche”. Sa démarche, qu’il souhaite être positive, est de faire reconnaître par le biais du film et au-delà des sombres moments du Gouvernement de Vichy, “les blessures infligées aux minorités, quelles qu’elles soient.”
“Sarah’s Key est indéniablement relié à une page de notre histoire, l’histoire concerne une famille juive, à Paris en 1942. Oui, mais cet événement est en résonance avec la période à laquelle nous vivons. Dans notre monde actuel, le communautarisme gagne du terrain et je souhaite que le film puisse montrer les dangers et l’absurdité des dérives lorsqu’elles sont poussées à l’extrême.”
Que pense-t-il du devoir de mémoire? Il se défend de vouloir donner une leçon au spectateur et d’imposer un sentiment de culpabilité, “le meilleur moyen d’obtenir l’effet contraire.” “C’est un film, c’est un thriller, ce n’est ni un documentaire historique ni un outil pédagogique. Il faut non pas montrer du doigt mais intéresser.”
Il est vrai qu’on serait presque tenté de parler d’enquête policière si le thème n’en était pas aussi tragique. Le rythme rapide de l’intrigue, le va-et-vient entre 1942 et le présent, entre Paris, la campagne française et les Etats-Unis, la quête de la vérité, et la douloureuse résolution du mystère gardent le public en haleine et l’amènent à se poser la question, comme le fait avec ses collègues Julia, la journaliste interprétée par Kristin Scott Thomas: “Qu’auriez-vous fait à leur place?” À ceci Gilles Paquet-Brenner ajoute : “En France, bon nombre dans la salle se sont demandé quel rôle leurs parents avaient pris pendant la guerre, quelle position ils avaient adoptée ou subie, collabos, résistants, témoins passifs ou victimes…”
“Il reste peu de survivants de cette époque. À part dans quelques films comme Monsieur Klein, ces épisodes n’ont été évoqués qu’en filigrane. On peut en parler plus calmement aujourd’hui. Mon film apporte un point de vue très contemporain sur l’histoire; c’est une réflexion sur le passé, le restituant pour mieux l’affronter, l’assimilant pour permettre de construire notre futur.”
Gilles Paquet-Brenner, dans sa transcription cinématographique très fidèle du roman, aura lui aussi traité de faits historiques et de leurs répercussions sur des générations futures. Mais il veut terminer sur un message d’espoir. Si les séquences consacrées au passé semblent nombreuses, peut-être en raison de la puissance des images, une place prépondérante est donnée au présent et au futur, au futur de la petite Sarah. Dans la version française, il a d’ailleurs choisi en ultime image de cadrer la petite fille, derrière la grande baie vitrée du restaurant, regardant, les yeux écarquillés, le parc qui s’étale à ses pieds.
Signe du destin? Il a choisi d’appeler son premier enfant, qui a vu le jour le dernier jour du tournage de Sarah’s Key, Sunniva : le don du soleil en norvégien.